U-zine.org, webzine musical metal actif entre 2004 et 2015. Fermé en 2015 suite à sa fusion avec 2Guys1TV, ses articles (chroniques, live-report, interview, dossiers, ...) sont désormais disponibles directement sur Horns Up via ce compte !
Après un premier essai intitulé Rabid Death's Curse qui a été salué par les critiques en 2000 et un album live, Watain s’est remis au travail pour nous proposer un deuxième album studio en 2003 : Casus Luciferi. Un autre groupe de black a sorti un album au nom de Casus Luciferi, moins de six mois après : Abruptum. Mais c’est bien le disque de Watain qui a fait sensation, et nous allons voir pourquoi.
La pochette, reprenant une oeuvre de Julius Schnorr von Carolsfeld (19ème siècle) dans le livre « The Seventh Seal », est à la fois en noir & blanc et très sombre. Elle colle parfaitement à la froideur que Watain veut faire véhiculer et est en adéquation avec le livret et les textes (typographie) à l’intérieur. L’intérieur, justement, venons-y : plongeons dans l’antre musicale de la bête…
Tout d’abord, par rapport à ses comparses suédois Marduk ou Dark Funeral, Watain se veut moins linéaire et beaucoup plus noir et malsain. Ils ont bâti une muraille de froideur dans cet album et sa production, au son vraiment massif, renforce cette idée de mur qui se dresse face à nous. De plus, le fait qu’on entende bien la basse apporte un fond sonore supplémentaire non négligeable à l’album : c’est un bloc. Enfin, toujours à propos de cet aspect compact, on constate que tous les morceaux font plus de cinq minutes, pour une durée totale de cinquante minutes. Puis, Watain puise son inspiration mélodique dans les premiers albums de Dissection, mais a su imposer sa brutalité, supérieure à l’ex groupe de Jon Nodveidt. Aussi, on pourra trouver des points communs entre ce que Watain propose là et ce qu’a livré Mayhem à ses fans sur l’album De Mysteriis Dom Sathanas. Cependant, les compositions de Watain ont évolué entre l’album précédent, Rabid Death's Curse, et celui-ci : elles sont un peu moins violentes, mais on pourra les trouver beaucoup plus travaillées. Pour illustrer cela, en plus des riffs mélodiques bien composés, on note de nombreux passages avec des variations de rythmes : soit des accélérations brusques (« Black Salvation », « Puzzles Ov Flesh »), soit des ralentissements obnibulant après une agression effrénée (« Opus Dei »). Ces changements apportent du relief à la messe noire de Watain. Au passage, on remarque que les scandinaves ont imité les grands du passé comme Immortal sur « Black Salvation » : le morceau s’interrompt subitement avant sa fin logique. Une coupure nette, tranchante, qui coupe l'élan et casse notre dynamique, pour nous envoyer un cri haineux d'Erik Danielsson pour commencer le titre suivant.
Ensuite, dans cet amas putride se détachent trois perles imparables : d’un « I Am The Earth » très inspiré par Dissection, d’un « Devil's Blood » très old school et d’un titre éponyme « Casus Luciferi » aussi long que sournois, on reçoit une sévère correction ! Watain y est au sommet de son art ; un art dont on pourrait écrire des pages entières. Nous pourrions faire de même au sujet des textes de l’album, qui sont des hymnes à Satan. Co-écrits par Watain et par le monstre aux trois têtes de Necromorbus de Funeral Mist, MkM d'Antaeus et Scorn de Katharsis, ceux-ci représentent un désert d’inhumanité dans lequel on se perd. Bien sûr, il faut souligner le travail du maître d’œuvre de Watain : Erik Danielsson (E). Il est vraiment bon sur l’album. Ses vocaux torturés et haineux sont plus que convaincant : ils gèlent la glace déjà épaisse qu’a constitué la musique. Les parties de basses (de lui-même ou d’Alvaro Lillo, alias A.) n’ont rien d’exceptionnel, mais elles contribuent à rendre plus noir encore un album dont les compositions de guitare et le chant le sont déjà. Pelle Forsberg (P - guitare) a quant à lui composé magnifiquement cet album en s’inspirant des bonnes recettes de l’histoire du black metal et en ayant su proposer un hommage à Lucifer autant compact que froid, mélodique, brutal, épique, varié, accrocheur. Réussir à rassembler toutes ces spécificités est un pari extrêmement difficile que Watain a su surpasser. Ensuite, Håkan Jonsson (H) à la batterie est excellent. Satan a trouvé là son marteau destructeur idéal.
Enfin, Watain a choisi de nous emmener dans sa source avec le titre « Watain ». C’est une reprise d’un morceau des mythiques américains de Von (démo 1992, et seul album). On comprend ainsi mieux d’où vient le nom du groupe. Cette reprise, uniquement présente sur la réédition 2008 de Season Of Mist, se veut dans l’esprit du morceau original : une production minimaliste, un son poisseux au possible et beaucoup de haine. C’est aussi une réussite.
Pour conclure, Casus Luciferi est un album vraiment formidable. Watain a sorti en 2003 cet album culte, pour le culte de Satan. Son titre veut pourtant dire « la chute de Lucifer », mais n’allez pas croire que vous allez être épargnés… L’espèce humaine est en danger !
1. Devil's Blood
2. Black Salvation
3. Opus Dei (The Morbid Angel)
4. Puzzles ov Flesh
5. I Am the Earth
6. The Golden Horns of Darash
7. From the Pulpits of Abomination
8. Casus Luciferi