L'autre belge de la rédac'. Passé par Spirit of Metal et Shoot Me Again.
Comment, en deux ans à peine, les Américains de Uada ont-ils pu passer du statut de groupe prometteur de la scène black metal à celui de nouvelle hype, le temps d'un seul petit album d'un peu plus d'une demi-heure et de quelques tournées européennes ? Devoid of Light, bien sûr, avait ses qualités – efficace, bien composé et ouvertement influencé par Mgla dont on sait l'admiration que lui vouent ceux qu'on pourrait appeler les « nouveaux » fans de black metal.
Rien de péjoratif ici : je fais moi-même partie de ces personnes ayant en quelque sorte découvert le black metal dans ses formes les plus récemment populaires, qu'il s'agisse du black atmosphérique pullulant (et inégal en termes de qualité) ou de la mouvance black cyniquement dite « à capuches »... dont Mgla et donc Uada font partie.
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Mais tout engouement aussi subit amène le scepticisme et Devoid of Light, aux influences un peu trop évidentes, appelait à une confirmation via ce Cult of a Dying Sun. Même si la première confirmation passe également par le live et que dans ce domaine également, Uada souffle le chaud et le froid : à la fois brut de décoffrage et cultivant encore sa ressemblance avec les autres « capucheux », ils peuvent toutefois se reposer sur quelques tueries comme l'excellent Black Autumn, White Spring, qui clôt aussi bien leurs concerts que leur premier opus.
Une des particularités de Uada tenait aussi à ce chant, certes parfois assez classique dans la veine black moderne et caverneux mais traversé par moments de « hululements » plutôt caractéristiques et assénés avec à-propos sur Devoid of Light. Manque de pot, dès l'entame de Cult of Dying Sun, c'est déjà la débandade : le chant part dans tous les sens, comme si Jake Superchi, au demeurant talentueux, voulait étaler ses capacités en cinq minutes. Criarde, hululée, parfois presque growlée et plus proche du death, sa voix rend The Purging Fire, pourtant efficace, un peu pénible. On remarque pourtant immédiatement que cette patte assez rock'n roll, avec cette batterie quasi-dansante, est toujours là, donnant à Uada une teinte assez hybride et loin du black traditionnel. Des particularités qu'on retrouve également chez la scène polonaise, et on ne pense même pas tant ici à Mgla qu'à d'autres noms comme Arkona, voire le Behemoth de The Satanist dans cette volonté de versatilité vocale.
Uada continue donc à se différencier du reste de la scène américaine et c'est plutôt bien vu tant les clones de Wolves In The Throne Room et Panopticon se multiplient sans pour autant amener grand chose. Seul l'instrumental The Wanderer évoque vaguement les décors majestueux des USA, mais son manque d'intérêt casse à vrai dire le rythme d'un album qui en manque déjà cruellement.
Car c'est bien là que le bât blesse : si on se disait par moments que Devoid of Light péchait par sa courte durée, on se rend compte avec le recul que c'était peut-être bien au final sa principale qualité, qui lui permettait d'éviter la lassitude. Trente-trois minutes et peu de déchet, contre... 55 minutes et presque aucun titre en-dessous des huit minutes pour Cult of a Dying Sun. Pour le meilleur et pour le pire.
Le meilleur, c'est l'excellent et futur incontournable live Snakes & Vultures, avec son riff déjà entendu mille fois mais glaçant et son « refrain » efficace à souhait ( « fucking snakes & vultures »). C'est aussi ce final certes un peu longuet (10'27) mais aux mélodies centrales assez épiques, Mirrors, qui n'atteint pas le niveau de Black Autumn, White Spring mais s'avère une conclusion honorable. Le pire, c'est ce qu'il y a entre ces titres : le vide. Si le titre éponyme m'avait fait forte impression à sa sortie, les écoutes successives le rendent presque lourdingue, notamment ce passage central aux vocaux crispants. Le final au piano, surprenant, de Sphere ne sauve pas le morceau d'une construction banale et de longueurs interminables et on se rend au final compte que chaque titre sur Cult of a Dying Sun aurait pu être amputé de deux bonnes minutes.
La leçon à tirer des années qui passent est que les « clones », bien souvent, disparaissent une fois la hype passée. Il est un peu trop tôt pour dire que Uada fera partie de ces futurs oubliés, propulsés en haut de l'affiche trop vite et incapables d'assumer derrière, mais Cult of A Dying Sun n'est en tout cas pas la « confirmation » que l'on attendait. Sans être mauvais, ce second opus de Uada devait faire bien mieux, car on ne peut être ici aussi indulgent qu'à la sortie de Devoid of Light. Dont acte...
Tracklist
1. The Purging Fire (5:59)
2. Snakes & Vultures (9:37)
3. Cult of a Dying Sun (8:18)
4. The Wanderer (5:39)
5. Blood Sand Ash (7:55)
6. Sphere (Imprisonment) (8:00)
7. Mirrors (10:28)