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Album

29 mars 2017 - Gazag

Teitanblood

Accursed Skin

LabelNorma Evangelium Diaboli
styleBlack / Death
formatEP
paysEspagne
sortiedécembre 2016
La note de
Gazag
8/10


Gazag

Il y a trois ans, Teitanblood cassait la baraque avec leur dernier album : Death. Une galette monstrueuse sur bien des points. Profond, noir, tentaculaire et difforme, le CD se distingue également par sa durée : une heure dix d’un Death Metal dense et compact pour 7 morceaux. Après avoir bouffé le CD, la digestion est presque aussi intéressante que le plat en lui-même. C’est pourquoi trois années semblent tout à fait nécessaires pour revenir doucement aux affaires, et pourquoi pas, justement, avec un EP.

Accursed Skin sort juste avant les fêtes de fin d’année, toujours chez les boys de Norma Evangelium Diaboli. Teitanblood propose la même formule que celle adoptée depuis Purging Tongues en 2011 : plus c’est long, plus c’est bon. Deux morceaux se tirent la bourre sur cet EP, chacun dépassant les 10 minutes. L’observateur averti repérera rapidement la petite filouterie : la seconde piste, Sanctified Dysecdysis, était déjà présente sur un précédent EP sorti en 2012 (Woven Black Arteries). Certes, le morceau est pour la première fois dispo en vinyle, mais cet Accursed Skin ne contient en réalité qu’une seule réelle exclusivité. Arnaque au portefeuille pour les fans, pain béni pour les collectionneurs.

Je suis bien embêté. Par quelle patte attraper l’araignée Teitanblood, en réalité ? En lançant une piste, on ne sait jamais à quel voyage on prend part. Assurément, chacun des deux morceaux déploie une grande palette d’émotions, avec une composition qui prend le temps d’en présenter chaque aspect, de mettre du liant entre les riffs sans se précipiter, balayant d’un revers de main le couperet des 5 minutes réglementaires. La composition Black/Death est exemplaire. Les riffs que l’on aimerait voir se poursuivre se poursuivent, ceux qui doivent à présent s’effacer s’effacent, ceux qui gagnent à exploser explosent. Ces réglages précis et réfléchis tirent les ficelles dans l’ombre, laissant le chaos massif et imprévisible en frontal.

Car Teitanblood est fatigant. La musique des Espagnols n’est pas engageante au premier abord, et demande de l’attention si l’on veut comprendre ce que propose la bête. Comme à chaque nouvelle sortie, on se refait souffler par ce mur de son compact et robuste. Puis on prend son marteau et son burin et on le travaille.

Accrued Skin n’est pas violent, de prime abord. Il ne pratique pas de gros break sauvage, ne met pas particulièrement en avant ses blasts. Il ne brutalise pas l’auditeur en le secouant dans tous les sens. Il préfère le placer dans une embarcation inhospitalière, où le groupe gère courants et remous. L’absence de cassures fortes dans la musique trace une ligne droite, homogène, de laquelle il ne faut pas se détourner, au risque de perdre l’équilibre et se faire aspirer (parfois par plaisir) par un quelconque tourbillon voisin.

En comparaison avec l’album Death, le son tire plus vers le Black Metal. Les guitares sont tapies dans l’ombre et rampent. Sur Death elles étaient plus abrasives, tranchantes et démonstratives. Les cymbales sont bien mises en avant, les toms sonnent comme des haut-bois. On retrouve cette voix caverneuse et lointaine, appuyée par un écho bien abusé. Par moment, grâce à la post-prod, le chant sort de sa tanière et se démultiplie. Pour un résultat assez vulgaire à vrai dire. La voix quitte son rôle de témoin apocalyptique. Elle gagne en puissance, mais perd de son mysticisme occulte. Ca ne pouvait pas être quasi-parfait sur tous les tableaux non plus.

Teitanblood n’a rien à présenter sur la maîtrise technique pure. Ca n’a jamais été leur came. Les Espagnols se distinguent sur l’exploitation totale de leur riffs et surtout sur l’assemblage parfait de toutes ces parties, qui forment un épais fluide noir, complètement opaque et uniforme, terrain de longues aventures morbides. Tantôt des parties Death écrasantes avec une pluie de blasts, tantôt des nappes Black où le chant te susurre des mensonges à l’oreille. Un Death visqueux, accompagnant la chute infinie de corps inertes, jetés dans une fosse sans fond, la vitesse faisant craquer des soli fulgurants, qui naissent aussi vite qu’ils meurent. 

Cet Accursed Skin offre toutes les clefs pour l’évasion, sans destination ni trajet connus à l’avance, avec de longues et intenses péripéties. Dommage que cet EP ne contienne en réalité qu’une seule nouvelle piste, le titre éponyme, sinon, c’était carton plein.

1 - Accursed Skin
2 - Sanctified Dysecdysis