Mono + Solstafir + The Ocean
CCO - Lyon
Encore Solstafir diront certains. Il est vrai que nos amis Islandais étaient déjà venus il y a neuf mois en terres lyonnaises, et reviennent ce samedi soir, accompagnés des Japonais de Mono et des Allemands de The Ocean, dans le cadre de leur tournée européenne débutée le 12 octobre (Aarhus) et s’achevant le 7 novembre (Leeds). Les musiciens ont déjà dix-sept dates au compteur. C’est l’association Sounds Like Hell Productions qui organise leur passage au CCO de Villeurbanne.
Alors que les hostilités doivent débuter à 19h30, je ne me presse pas, habitué des premières parties vides, en termes d’affluence. Et bien cette fois c’est raté, une longue file d’attente déborde jusque dans la rue, alors que The Ocean commence déjà à jouer. Peu importe à vrai dire, je ne suis pas venu pour eux.
The Ocean
Non.
Je passe mon tour.
Solstafir
Il faut croire que je n’étais pas rassasié de leur (excellente) prestation de janvier dernier au sein de ce même CCO, au point de me taper deux cents bornes aller-retour en bagnole rien que pour les voir de nouveau. On prend presque les mêmes et on recommence. J’ai bien dit presque, puisque suite au départ mouvementé de leur batteur historique Guðmundur Óli Pálmason, le poste vacant est provisoirement occupé par un musicien de session, visiblement différent de celui du début d’année. Bref, passons sur ces histoires de coulisses et accueillons comme il se doit nos cow-boys d’Islande, dans une salle bondée. Comme d’habitude, c’est sur la mélodie de « Náttfari » que les quatre individus entrent en piste, cet instrumental est toujours aussi efficace pour introduire leur show, épique et entraînant, à la hauteur de l’impatience d’entendre les premières notes résonner. La formation emmenée par Aðalbjörn Tryggvason va nous proposer ce soir sept titres extraits de leurs trois précédents albums, à savoir Ótta, Svartir Sandar et Köld. Les natifs de Reykjavik ont du métier, et surtout un indéniable talent pour distiller leurs compositions désormais cultes ; ils ne se limitent pas à calquer les versions studios, ils s’autorisent quelques petites variantes bien senties, avec cet esprit rock’n’roll en véritable fil conducteur. Pas une seule fausse note, des solos percutants avec ce côté hautement atmosphérique dans les compos, me faisant replonger dans mes souvenirs encore récents des Westfjords, Dyrhólaey, Goðafoss, Snaefellsnes et autres inoubliables paysages d’Islande. Leur musique est complètement addictive et leur setlist impeccable, même si on en aurait souhaité plus, aujourd’hui ils n’occupent pas la tête d’affiche ; on a évidemment eu droit à leur tubesque et immersif « Ótta », le méditatif « Náttmál », l’intimiste « Fjara » ou encore le mélancolique « Goddess of the Ages ». Pendant les premiers morceaux, je pensais que le frontman, d’habituel très communicatif, était en un peu effacé mais finalement non, durant la seconde moitié du set, le bonhomme a mis à contribution le public et n’hésita pas à faire quelques accolades avec des spectateurs. Même si cela peut être secondaire, notons la parfaite maîtrise des lights durant leur show, en phase avec les mélodies et les ambiances ; la qualité du son est également à mettre à l’honneur, permettant d’apprécier toute la finesse de leur jeu et en offrant une belle clarté. Bref, Solstafir m’a de nouveau complètement convaincu aujourd’hui, ce groupe est vraiment hors normes !
Setlist :
Dagmál
Ljós í Stormi
Ótta
Náttmál
Pale Rider
Fjara
Goddess of the Ages
Mono
Alors pour le coup, je n’avais jamais entendu parler de Mono jusqu’à l’annonce de l’affiche. Pour autant, les quelques mots de présentation de Sounds Like Hell sur la page de l’événement avaient attiré ma curiosité, évoquant un « post-rock instrumental » et « musique alambiquée, furieuse et psychédélique » pour qualifier le travail des Japonais. Le groupe est composé de quatre membres : trois hommes à la batterie et aux guitares, ainsi qu’une femme s’occupant de la basse, du piano ou du xylophone. Comme évoqué précédemment, les asiatiques proposent des titres uniquement instrumentaux, dans un registre post-rock/shoegaze et donc par définition planant au possible. A la lecture de cette description, on pourrait penser à quelque chose de rapidement ennuyant, pourtant, c’est tout l’inverse qui va se produire, bien que les membres soient très statiques et peu expressifs sur scène (la rigueur nippone, dira-t-on). Six titres vont être interprétés ce soir, plus ou moins tous construits selon le même schéma : d’abord une introduction acoustique, lente et immersive, puis petit à petit l’émotion monte crescendo, avec ces notes aigues complètement célestes, jusqu’à atteindre l’apothéose, la jubilation à la fin. Plus que de la beauté, c’est auditivement orgasmique. Connaissant très peu cette scène musicale, Mono me fait quand même penser à Arctic Plateau ou, pour faire le lien avec le milieu metal, au côté shoegaze d’Alcest. Moi qui place l'émotion, le ressenti au cœur de mes priorités au niveau musical, on peut dire que j’ai été servi avec Mono ; le quatuor a plongé la salle dans son univers intimiste et spirituel, captivant du début à la fin. Avant ce soir, je me demandais qui pouvait bien se targuer d'être au-dessus de Solstafir en termes d'affiche. Les arguments exposés par les locataires de Tokyo auront été convaincants. Le Blackeux que je suis a été séduit par ces Japonais, qui l’eut cru !
Setlist :
Recoil Ignite
Death in Reverse
Kanata
Halcyon (Beautiful Days)
Ashes in the Snow
Requiem from Hell
Alors que j’étais venu pour un seul groupe en particulier, je ressors de la salle avec la confirmation que Solstafir est véritablement légendaire, mais également avec cette superbe découverte des Japonais de Mono. Une bien belle soirée. Merci à tous les acteurs.