Non.
Myrkur me gêne.
Qu'est-ce qui est pire que de penser et proclamer que le Black Metal est un univers masculin ? Eh bien je suppose que c'est de faire croire à une avancée des mentalités en appuyant partout et tout le temps sur le détail "hey, regardez, elle a des boobs et pourtant elle fait du Black Metal". Pourquoi tant insister ? Parce que c'est vendeur. Du coup, je considère ça comme étant encore plus à vomir que n'importe quel comportement macho dans le monde du BM. Ce n'est pas en rendant la chose faussement exceptionnelle qu'on pourra crier à la victoire. Je n'aurais pas relevé ce point si le label et elle-même ne jouaient pas à fond sur cet argument pour la promotion du projet, et avaient laissé la chose se faire naturellement, présentant simplement le "one woman band" comme un groupe lambda et pas comme un vagin sur pattes.
"The Future Of Black Metal" titrent les magazines qui proposent sa tronche en couverture. Second argument de vente. Non.
Pour la majorité de ses titres, Myrkur ne joue presque pas du Black Metal, il faut arrêter. On a pu rapprocher son univers de celui d'Ulver période "Bergtatt", ce qui est complètement justifié si on écoute "Onde Børn" entre autres, ou qu'on se rend compte qu'on a Garm du côté de la production. Mais je ne pense pas que ce soit un argument tant c'est déjà à la limite des frontières qu'on se trouve ici. C'est de la Pop métallisante encore si vous voulez, mais j'ai vachement plus l'impression d'écouter School Of Seven Bells, Cocteau Twins ou My Bloody Valentine, et je m'excuse auprès d'eux, que n'importe quel groupe de Black.
Alors qu'en plus on me le vende comme un renouveau alors que, selon moi ça sous-entendrait quand même qu'on parte d'une base établie pour sortir des contraintes et créer quelque chose d'innovant, il faut pas abuser. Myrkur n'innove pas, non, il s'agit juste de mettre un chant Dream Pop éthéré sur une composition vaguement Black simpliste avec un son totalement agaçant. Ajoutons à cela ce qui fait le plus bander le plus grand nombre en ce moment, le délire nordico-pagan-et-compagnie, et vous entendrez presque les pièces d'or qui s'entrechoquent en formant un tas.
Comment est-ce qu'une nana entourée de gens aussi reconnus et/ou qui ont les poches bien pleines peut oser proposer quelque chose d'aussi synthétique et sans tripes ? Si c'est pour le côté mauvaise production, hommage aux racines Black, je crois qu'elle s'est légèrement trompée en confondant son plastique avec son Raw.
Bon, allez. Concrètement, qu'est-ce que ça vaut ce petit "M" ?
J'aurais aimé vous dire que le côté rêveur, planant, féérique m'a transportée. Mais la recette ne fonctionne pas sur moi. Qu'est-ce que c'est vide et fade ! Ni entêtant, ni lancinant, aucune émotion ne se dégage des compositions et rien ne vient rattraper l'ensemble. Dès l'ouverture avec "Skøgen Skulle Dø", on sent un effort de mis sur les atmosphères grâce aux petits détails çà et là, le chant féminin éthéré ou le violon dissonant mais la composition en elle-même reste terriblement simpliste et scolaire. On a du mal à entrer dedans tout simplement car il ne se passe rien, les riffs ne proposent aucune atmosphère par eux-mêmes. Son chant Black semble tellement transformé lors du mix qu'on a du mal à croire qu'elle puisse réellement le chanter, bien que je ne puisse pas en dire autant de son chant clair qui, lui, est tout à fait maîtrisé même s'il ne me touche pas. En ce sens, le seul titre que j'ai réussi à apprécier reste "Vølvens Spådom", qui sert d'intro au titre suivant mais qui propose un interlude complètement calme et serein mené par une voix mélodieuse, auquel on ne peut pas reprocher grand chose. Dans la même veine, "Dybt i Skoven" repris de son EP précédent a au moins le mérite d'avoir un chant qui reste en tête, bien que la batterie et la structure du titre auraient pu être largement plus alambiquées. Finalement, le titre d'origine et le nouveau n'ont que peu de différences.
Dans l'ensemble, la majorité des titres donne l'impression de n'être absolument pas aboutis. On se retrouve avec une suite de riffs où on n'a pas spécialement de montée en intensité, ni de changement profond, on n'a aucun élément auquel se raccrocher pour espérer un peu de surprise, laisser Myrkur nous étonner. C'est selon moi le plus gros défaut de cet album qui, malgré tout le mal que je peux en dire, possède tout de même quelques très bonnes idées mais toujours très maladroitement amenées. Les morceaux auraient mérité d'être plus réfléchis et complexes, quitte à en mettre moins sur "M" mais les rallonger afin de leur donner une véritable touche originale et un grain différent, car là où on s'attend à voir le titre devenir épique ou majestueux, il se termine et nous laisse indifférent. Seul "Mordet" déroge presque à la règle en laissant le morceau progresser tranquillement et revenir sur une dernière partie avec quelque chose d'un peu plus accrocheur que le reste de l'album, alors que le morceau ne fait même pas quatre minutes. Une surprise vite étouffée avec une fin minable en decrescendo, sans aucune raison...
Si on arrive à laisser de côté tout ce qui englobe le projet, tant les éloges infondées que la promo qui a tendance à me dégoûter, je dirais que même si quelques bonnes idées sont bien là, l'ensemble est maladroit, inabouti, encore très léger par rapport à ce qu'elle serait capable de faire vu ses influences variées et son ambition. Reste à voir comment évoluera le projet, mais j'ai peu d'espoir que Madame prenne en compte ce type de remarques puisqu'elle a déjà trouvé un public pour ce qu'elle nous propose. Néanmoins je vous conseille fortement d'aller écouter Ulver ou de la Dream Pop et de ne pas perdre votre temps avec cet album plus que moyen.
1. Skøgen skulle dø
2. Hævnen
3. Onde børn
4. Vølvens spådom
5. Jeg er guden, i er tjenerne
6. Nordlys
7. Mordet
8. Byssan lull
9. Dybt i skoven
10. Skaði
11. Norn